par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)
En 1989, René Richard Cyr et son Théâtre Petit à Petit qui allait devenir PàP peu de temps après, proposaient une production audacieuse d’une pièce qui l’était pour son époque (écrite près de 100 ans plus tôt), dans une nouvelle traduction de Jean-Luc Denis, au Théâtre de Quat’Sous avec un paquet de jeunes inconnus prometteurs: Anne Dorval, Patrice Coquereau, Luc Picard, David LaHaye, Dominique Quesnel, Isabelle Vincent, Luc Gouin, Sylvie Drapeau… Une scénographie de Danièle Lévesque où (si ma mémoire est bonne) des dizaines de bouleaux rachitiques représentaient la forêt dans laquelle s’éveillaient les sexualités de Moritz, Melchior, Wendla, Martha, Otto...
Il fallait le brillant David Paquet (Le Brasier, Le Poids des fourmis) et le visionnaire Olivier Arteau (Doggy dans Gravel, La Pudeur des urinoirs, Pisser debout sans lever sa jupe, Antigone), maintenant directeur artistique du Théâtre du Trident, coproducteur du spectacle, pour revisiter la partition de Frank Wedekind et d’en faire une toute nouvelle œuvre super contemporaine pourtant bien connectée sur l’originale. La preuve que plus ça change, plus c’est pareil !
Après avoir connu un méga succès sur la scène du Trident, la troupe de L’Éveil du printemps arrive au Théâtre Denise-Pelletier pour faire découvrir aux groupes scolaires de la grande région métropolitaine tout autant qu’au grand public montréalais cette production à la mise en scène turbo chargée, à l’énergie vivifiante, électrisante, sensuelle. Pourtant, là où René Richard Cyr avait exploité la lubricité et le feu naissant dans les entrailles des jeunes personnages, Olivier Arteau, qui n’hésite généralement pas à affronter la sexualité de plein fouet, réussit ici de belle façon à faire deviner la passion plutôt que de la montrer.
Avec de brillantes chorégraphies acrobatiques, athlétiques voire circassiennes (signées Fabien Piché et Olivier Arteau) et énormément d’humour principalement amené par les personnages adultes (les mères, enseignante, patronne, vendeur, prêtre, patronne, orienteur, metteure en scène, père incarnés par Marie-Josée Bastien – hilarante et plus caméléonne que jamais –, Ariel Charest comme un poisson dans l’eau et Sébastien Rajotte), le spectacle est absolument sans faille.
La scénographie dépouillée d’Amélie Trépanier qui consiste principalement en une pente multifonction, les costumes colorés de Linda Brunelle, les éclairages chaleureux de Jean-François Labbé ainsi que la musique et l’environnement sonore créés par Antoine Berthiaume s’harmonisent à merveille avec la vision du metteur en scène.
Reste plus qu’à dire que Gabriel Favreau (Moritz), Gabriel Lemire (Otto), Claude Breton-Potvin (Melchior), Lé Aubin (Ilsle), Carla Mezquita-Honhon (Martha) et Sarah Villeneuve-Desjardins (Wendla) sont tellement beaux à voir, si touchants, drôles, à couper le souffle de talent que l’on sort du Théâtre Denise-Pelletier gonflés à bloc.
L’Éveil du printemps de David Paquet librement inspiré de l’œuvre de Frank Wedekind Mise en scène: Olivier Arteau Assistance à la mise en scène: Daniel D’Amours Avec Marie-Josée Bastien, Lé Aubin, Claude Breton-Potvin, Ariel Charest, Gabriel Favreau, Gabriel Lemire, Marc-Antoine Marceau, Carla Mezquita-Honhon, Sébastien Rajotte et Sarah Villeneuve-Desjardins Scénographie: Amélie Trépanier Costumes: Linda Brunelle Assistance aux costumes: Marie-Audrey Jacques Lumières: Jean-François Labbé Chorégraphies: Fabien Piché et Olivier Arteau Conception sonore: Antoine Berthiaume Accessoires: Églantine Mailly Maquillages: Élène Pearson Stagiaire: Didier Senécal Une coproduction du Théâtre Denise-Pelletier et du Théâtre du Trident Du 23 janvier au 17 février 2024 (1h50 sans entracte) Théâtre Denise-Pelletier, 4353, rue Sainte-Catherine, Montréal Réservations: 514-253-8974 Information: www.denise-pelletier.qc.ca Photos: Stéphane Bourgeois
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