par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)
Artiste autochtone de l’Argentine, homosexuel, Tiziano Cruz a vécu beaucoup d’oppression et revendique haut et fort le droit d’être soutenu dans son art. Avec Soliloquio, il s’inspire à la fois de plus de cinquante lettres qu’il a écrites à sa mère pendant les confinements de la pandémie de COVID-19 et des «éléments» que son père a collectés «pendant le voyage de plus de quinze heures qu’il a entrepris dans les villages autour de notre maison d’enfance, à Jujuy, dans le nord de l’Argentine, dans ces villages dont on ne peut y parvenir qu’à pied, par des chemins étroits ouverts dans la roche».
Avant de s’engouffrer dans l’antre qu’est le mythique Théâtre Le National de la rue Sainte-Catherine, ouvert en 1900, haut lieu du burlesque, du music-hall et de la comédie ayant accueilli les Rose Ouellette, Juliette Petrie, Fred Barry, Albert Duquesne, Olivier Guimond père et fils avant de deviner pendant plusieurs années le Cinéma du Village pour ensuite revenir à sa première vocation, accueillant surtout des «variétés» et les tournages de Belle et Bum, le charismatique Tiziano Cruz précédera un défilé de chanteurs, danseurs, musiciens folkloriques d’Argentine des Jardins Gamelin à l’entrée du théâtre où il serrera chaleureusement la main de chacun des quelques centaines de spectatrices et de spectateurs venu.e.s à la rencontre de son Soliloquio.
Malheureusement, malgré toute la bonne volonté des organisateurs du FTA, les sourires contagieux des danseurs et danseuses qui suaient leur vie dans leurs superbes costumes colorés et l’accueil chaleureux que leur ont réservé tant les spectateurs convoqués que les quidam qui s’adonnaient à être là, la présence insupportable de nombreux photographes – certains accrédités, d’autres juste là avec leurs téléphones intelligents à filmer et photographier au détriment des vrais spectateurs, cette célébration festive s’est avérée interminable… comme d’ailleurs, le discours revendicateur beuglé dans un porte-voix en espagnol par la vedette du spectacle et traduite dans un français à l’accent espagnol mal servi par une sonorisation défaillante à cause du lieu. Si, au minimum, on avait gardé ce discours pour l’intérieur du théâtre, peut-être aurait-il été plus facile à ingérer. Servi comme ça, on finit par décrocher et avoir juste hâte que ça finisse.
Quand Tiziano Cruz entre enfin dans la salle, à la suite des spectateurs qui ont pris place dans leurs sièges, il monte sur scène et entreprend son soliloque avec cœur et conviction. Pour un public qui comprend l’espagnol, nul doute que toutes les nuances et toutes les revendications peuvent être saisies, mais pour un spectateur qui ne connaît que le français et l’anglais malgré ses quelques cours d’espagnol et ses deux ans de latin, le débit de l’acteur est beaucoup trop rapide pour être vraiment capable de suivre les surtitres, mais surtout d’apprécier ce que l’on tente de nous transmettre.
Pour moi, Soliloquio a donc manqué sa cible. C’est triste parce qu’à lire par après sur les Quipus et les belles traditions des peuples anciens de l’Argentine, j’aurais aimé pouvoir vraiment recevoir ce spectacle comme il le méritait.
Soliloquio Mise en scène, texte et interprétation: Tiziano Cruz Composition et conception sonore: Luciano Giambastiani Cinéaste: Matías Gutiérrez Lumières: Matías Ramos Photos: Diego Astarita, Matías Gutiérrez Révision des textes: Hugo Miranda Campos Production artistique: Luciana Iovane Production déléguée: Ulmus Gestión Cultural Direction artistique et costumes: Uriel Cistaro Conception et production des costumes: Luisa Fernanda Vega Cardozo, Luciana Iovane Production internationale et gérance: Cecilia Kuska – Rosa Studio Coproduction de Ulmus Gestión Cultural et FIBA 2022 – Festival Internacional de Buenos Aires Du 28 au 30 mai 2023 (approximativement 2h15 incluant un défilé de 45 minutes sur la rue Sainte-Catherine) Théâtre Le National, 1220, rue Sainte-Catherine Est, Montréal Information: https://fta.ca/evenement/soliloquio/
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