par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)
Un spectacle à la fois drôle et qui fait réfléchir, ça fait toujours du bien. Avec Classique(s), l’autrice Fanny Britt (co-autrice du Lysis qu’on a enfin pu voir la saison dernière) et l’homme de théâtre Mani Soleymanlou (comédien dans Abraham Lincoln va au théâtre, metteur en scène et auteur de Neuf [titre provisoire], producteur de Neige sur Abidjan et tout ça dans Zéro, Un, Deux, Trois…) unissent leurs forces et leur amour du théâtre, de la dramaturgie, pour créer un spectacle qui revisite les classiques (le mandat du TNM) et tergiverse sur le sens du mot, pas seulement au théâtre mais dans toutes les facettes de la vie humaine.
Le résultat est aussi rafraîchissant qu’un vent de printemps après un hiver dru et glacial. Réunissant sur scène quatre musiciens et huit comédiennes et comédiens, une distribution de virtuoses incluant plusieurs têtes d’affiche qu’on se régale de voir ensemble, le spectacle multiplie les clins d’œil aux denrées de base qui composent un spectacle de théâtre, tant du point de vue du spectateur que de celui de l’interprète, et plonge le public dans un cours 101 étonnamment ludique de compréhension des grands classiques (Euripide, Sophocle, Shakespeare, Racine, Tchekhov, Tremblay) par l’entremise de quelques grands monologues et quelques scènes dialoguées (à deux ou à trois).
Antigone, Bérénice, Médée, Albertine, Vania, Sonia, Marina, Lady Macbeth, Richard III, Hamlet, Shylock, Hermione, Cassandre sont autant de personnages qui viennent nous rappeler la grandeur de leurs auteurs respectifs. De par le concept de ce spectacle, après une introduction/présentation, un genre de «Le théâtre, ça remonte à quand?» écrit par feu Robert Gravel et interprété par Mani Soleymanlou, les comédiens formidables entrent et sortent de leurs personnages, redeviennent eux-mêmes, brisent le quatrième mur dans une multitude de numéros qui se succèdent avec beaucoup de fluidité.
Accompagnés d’un pianiste, d’une violoncelliste, d’une violoniste et d’un trompettiste, Kathleen Fortin, Madeleine Sarr, Jean-Moïse Martin, Mani Soleymanlou, Martin Drainville, Julie LeBreton, Benoit McGinnis et Louise Cardinal ont tous l’occasion d’être à la fois touchants et hilarants, particulièrement drôles dans ce procès pipé de l’humanité, clin d'oeil à la commedia dell'arte où viennent témoigner des attitudes et des «valeurs» incarnées ou dans la parodie d’En direct de l’univers où Benoit McGinnis joue une version hyperbolique de lui-même, trop excité, trop surpris, trop content, trop comique.
Ce spectacle est un pur délice, une occasion de relâcher la soupape en ces temps difficiles pour ne pas dire morbides, mais où les auteurs ne nous demandent pas de mettre notre cerveau à off, juste de réfléchir dans le plaisir avec des amis sur scène. Et pour certains, ceux et celles qui se croiraient nuls, des extraits de classiques bien joués – et parfois vulgarisés et expliqués – pourraient s’avérer des plus lumineux et éclairants.
Classique(s) de Mani Soleymanlou et Fanny Britt Mise en scène: Mani Soleymanlou Assistance à la mise en scène et régie: Jean Gaudreau Stagiaire à l’assistance à la mise en scène: Eric Vega Avec Martin Drainville, Kathleen Fortin, Louise Cardinal, Jean-Moïse Martin, Mani Soleymanlou, Madeleine Sarr, Benoît McGinnis et Julie Le Breton Musiciens sur scène: Mélanie Bélair (violon), Alexis Elina (piano), Annie Gadbois (violoncelle), Nicolas Boulay, Rémi Cormier et Andy King (trompette en alternance) Scénographie: Martin Labrecque et Mani Soleymanlou Costumes: Cynthia Saint-Gelais Assistance aux costumes: Sarah Chabrier Stagiaire aux costumes: Charlotte Maréchal Éclairages: Martin Labrecque Musique: Philippe Brault Accessoires: Marie-Jeanne Rizkallah Maquillages: Amélie Bruneau-Longpré Conception et confection des masques: Marie Muyard Perruques: Sarah Tremblay Direction technique: Jenny Huot Direction de production et de tournée: Charlotte Ménard Une création d’Orange Noyée en coproduction avec le Théâtre du Nouveau Monde (Montréal) et le Théâtre Français du Centre National des Arts (Ottawa) en codiffusion avec Le Diamant (Québec) Du 11 mars au 10 avril 2025 (Durée: 2 heures sans entracte) représentations mardi et mercredi 19h30, jeudi et vendredi 20h, samedi 15h et 20h ***Supplémentaires: dimanche le 30 mars 14h mardi le 8 avril 19h30 mercredi le 9 avril 19h30 jeudi le 10 avril 20h Théâtre du Nouveau Monde, 84, rue Sainte-Catherine Ouest, Montréal Billetterie: 514-866-8668, poste 1 - https://ticket.tnm.qc.ca Théâtre Babs Asper (Ottawa): 24 au 26 avril 2025 Diamant (Québec): 30 avril au 2 mai 2025 Photos: Yves Renaud