de Yanik Comeau (Comunik Media / ZoneCulture)
Développée dans le cadre du Fireworks Playwrights’ Program de Teesri Duniya Theatre, Psycho 6 est une preuve on ne peut plus tangible qu’un programme de soutien dramaturgique stimulant, généreux, solide qui offre aux auteurs les ressources nécessaires pour peaufiner et affiner leurs œuvres est une arme redoutable pour aider à la création de pièces significatives, riches et d’une précision formidable.
Ce qui ne veut pas dire que la version originale de Psycho 6 n’était pas déjà formidable. Je ne saurais dire puisque je n’étais pas là lorsqu’elle a été soumise au directeur artistique Rahul Varma et à l’ancienne assistante directrice artistique Liz Valdez pour qu’ils la lisent mais ce que j’ai vu vendredi dernier est clairement le résultat d’un travail d’atelier efficace par une impressionnante troupe d’artistes réunis pour créer une production de première qualité.
Bien que Psycho 6 puisse être un titre étrange (que je ne m’explique toujours pas) pour cette histoire, la pièce d’Oliver Koomsatira nous entraîne dans les méandres de la jeune vie de K, un homme à peine entré dans l’âge adulte dont les défis familiaux, culturels et financiers le tirent vers le bas et l’éloignent de ses espoirs, ses rêves, son potentiel. Tentant désespérément de joindre les deux bouts avec sa mère monoparentale troublée qui n’arrive pas à garder ses emplois et qui fume ou s’injecte l’argent du loyer et sa sœur de 12 ans qui requiert une attention particulière à cause de ses problèmes de santé, K est pris dans un tourbillon de délits de plus en plus graves dans un environnement où c’est chacun pour soi. Après avoir navigué les portes tournantes des familles d’accueil depuis l’âge de 9 ans, le jeune homme doit maintenant pagayer à contre-courant pour se trouver un emploi dans une société sans merci qui le juge sévèrement et qui a peu d’empathie pour un décrocheur issu de la diversité, sans diplôme d’études secondaires, qui possède un dossier judiciaire plus garni que son curriculum vitae.
Aucun doute que le texte du monologue cru et sans détour d’Oliver Koomsatira atteint la cible mais c’est sa performance qui est encore plus brillante, son jeu touchant, son habileté physique et sa grâce même dans la violence, son rap sans faille contribuant tous à l’explosion d’amour que cet artiste aux talents multiples a reçu à la fin de la représentation de la première. Son charisme et son énergie sans fond contribuent grandement à rendre à K tout ce qu’il faut pour qu’on s’attache à cet anti-héros et pour nous faire croire aux nombreux personnages secondaires. La mise en scène géniale de Liz Valdez est parsemée de toutes sortes de petites idées efficaces qui permettent à la production de rouler sans heurts, notamment le placement stratégique d’accessoires et de costumes qui permet au comédien de passer d’une scène à l’autre de façon impeccable. Valdez s’assure que chaque détail, chaque élément de cette production – la musique et la conception sonore géniale de Christine ML Lee, les costumes créatifs de Nalo Soyini Bruce et les éclairages et le décor ingénieux de Zoe Roux – se marient harmonieusement avec le soutien d’Elyse Quesnel à la régie et de James Douglas à la direction technique. Bien que l’interprète ait eu maille à partir avec le micro sans fil vendredi, une situation qui a sans doute donner de sérieux maux de tête à Elyse Quesnel, Koomsatira a réussi à s’en tirer sans qu’on ne s’en ressente trop et le problème a sans doute été réglé avant la représentation de samedi.
Psycho 6 est à la fois une pièce divertissante (grâce en grande partie au talent phénoménal d’Oliver Koomsatira comme acteur, danseur et rappeur) et une œuvre qui fait réfléchir, stimule le dialogue et la réflexion et touche droit au cœur. Chapeau au Teesri Duniya Theatre d’avoir créé une production si impressionnante.
Psycho 6 de Oliver Koomsatira (en anglais) Mise en scène: Liz Valdez Avec Oliver Koomsatira et les voix de Paul-Eric Hausknost, Prerna Nehta, Sean Ryan, Mahin Sekendra et Lily-Jolie Hausknost Assistante à la mise en scène: Alessandra Tom Régisseure de plateau: Elyse Quesnel Conception de décor et d’éclairages: Zoe Roux Conception sonore: Christine ML Lee Conception de costumes: Nalo Soyini Bruce Directrice de production: Masha Bashmakova Directeur technique: James Douglas Une production de Teesri Duniya Theatre Du 10 au 23 juin 2022 (Durée: 75 mins, sans entracte) Mardi au samedi à 20h, dimanche à 15h MAI, Montréal, Arts Interculturels, 3680, rue Jeanne-Mance, Montréal Billetterie: 514-982-3386 Billets sur Eventbrite: www.eventbrite.ca/e/psycho-6-tickets-308446049437
Photos: Jeremy Cabrera
Comments