par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)
Comme je suis fan de Mélanie Demers et de Frannie Holder et que j’ai de bons souvenirs de plusieurs pièces dans lesquels j’ai vu Sophie Cadieux (Les Larmes amères de Petra von Kant, Animaux, Disparu.e.s, Si vous voulez de la lumière…) et même quelques spectacles auxquels elle a participé à créer (notamment La Femme la plus dangereuse du Québec), j’avais bon espoir qu’Affaires intérieures me ferait vivre un vrai moment de bonheur artistique. Comme à l’habitude, j’avais très peu lu sur le spectacle avant (je fais plutôt mes recherches après pour ne pas arriver avec trop d’a priori). J’avais beau ne pas avoir d’a priori, j’avais des attentes et, bien que j’aie compris rapidement qu’il s’agirait d’un OVNI, sur le plan dramaturgique, c’est assez catastrophique. Certains iraient même jusqu’à dire que c’est du gros n’importe quoi.
Pour ma part, je n’irai pas jusqu’à excuser ce spectacle qui partait sans doute d’une bonne intention mais qui ne mène nulle part. C’est sûr que, sur papier, l’idée de Ginette Noiseux de rassembler trois artistes féminines aux démarches singulières et foisonnantes ne pouvait pas être mauvaise. Après tout, on est à Espace GO, la compagnie fondée sur les cendres du vénérable Théâtre Expérimental des Femmes. Ainsi, même si, à mon avis, le spectacle manque tristement de cohérence et n’aurait jamais mérité de se retrouver sur une scène aussi importante que celle d’Espace GO si cette démarche avait été proposée par des artistes de la relève, il reste qu’en morceaux, on peut en tirer du bon.
D’abord, on est saisi par le décor aussi flamboyant qu’étouffant de Geneviève Lizotte, d’énormes pelotes de peluche qui pourraient autant s’apparenter au monde du Lorax de Dr. Seuss qu’à l'intérieur d'un lave-auto, une gorge ou un vagin. C’est impressionnant! On ne peut qu’apprécier les éclairages et l’environnement sonore aussi.
Il y a quelques excellentes chansons (musique de Frannie Holder, paroles de Sophie Cadieux ou des trois interprètes – on ne le sait pas), des voix chantées et des arrangements vocaux impressionnants (on connaissait la voix de Frannie Holder et ses talents de musicienne mais dans mon souvenir, c’est la première fois que j’entendais Sophie Cadieux ou Mélanie Demers chanter), des chorégraphies saisissantes et énergisantes (Mélanie Demers est une grande chorégraphe, excellente danseuse, Frannie Holder m’a étonné, mais Sophie Cadieux tire de la patte, à mon avis).
Mais tristement, les propos poético-philosophico-métaphoriques du spectacle manquent de structure et sont balancés au public un peu n’importe comment alors qu’il aurait fallu un sérieux travail de dramaturgie. Ne s’improvise pas auteur qui veut et ce n’est pas la première fois que je me trouve agacé par de tels textes qui se veulent profonds et puissants mais qui finissent par tourner à vide avec des images mièvres.
Bref, bien que certains «numéros» aient été agréables et aient un peu racheté ces 70 minutes, Affaires intérieures ne passera certes pas à l’histoire. Dommage.
Affaires intérieures Une création de Sophie Cadieux, Mélanie Demers et Frannie Holder Assistance à la mise en scène: Anne-Marie-Jourdenais Avec Sophie Cadieux, Mélanie Demers et Frannie Holder Scénographie: Geneviève Lizotte Costumes: Ariane Michaud Lumières: Sonoyo Nishikawa Musique: Frannie Holder Sonorisation et régie générale: Frédéric Auger Coiffures et maquillages: Jessica Cohen Assistance à la scénographie: Carol-Anne Bourgon Sicard Assistance aux éclairages: Julie Laroche Assistance aux costumes: Mouchoir Delacrotte et Anne Fafard-Blais Direction de production et de création: Suzanne Crocker Direction technique: Alex Gendron Adjointe technique et couture décor: Maryline Gagnon Couture décor: Anaé Lajoie Racine Habilleuse: Nicole Langlois Une production Espace GO 16 janvier au 11 février 2024 (durée : 1h10 sans entracte) Théâtre Espace GO, 4890, boulevard Saint-Laurent, Montréal Billets: 514-845-4890 Informations: https://espacego.com/les-spectacles/2023-2024/affaires-interieures/ Photos: Yanick MacDonald
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