par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)
L’an dernier, c’est René Simard qui signait la mise en scène de l’excellente mouture de la revue de fin d’année du Théâtre du Rideau Vert. Dans le cadre de la saison «Place aux femmes», c’est à la metteure en scène, auteure, comédienne et script-éditrice «complètement accroc à cette revue» Natalie Lecompte, une fan, mais aussi une habituée ayant porté à peu près tous les chapeaux, que Denise Filiatrault a confié 2018 Revue et corrigée.
Appuyée par Daniel Leblanc, pour la première fois à la script-édition mais un habitué de Revue et corrigée et de l’écriture humoristique sous plusieurs formes, Natalie Lecompte s’est entourée de deux auteurs habitués de la revue (Cassandre Charbonneau-Jobin et Luc Michaud) et deux «p’tits nouveaux» qui ne sont néanmoins pas nés de la dernière pluie en ce qui concerne l’écriture humoristique (Justine Philie et Dominic Quarré). Parce qu’il faut le dire, on a beau avoir les meilleurs interprètes du monde, ce genre de spectacle repose d’abord et avant tout sur les idées, les amalgames que l’on fait entre les personnages et les événements et – au final – les textes. Évitant tellement habilement la vulgarité, le prout prout pouet pouet, les raccourcis faciles, chaque sketch semble partir d’abord et avant tout de personnages tellement solides et majoritairement bien présents dans l’actualité de la dernière année qu’aucun ne tombe à plat. Si deux ou trois des numéros (sur quoi, quarante?) sont peut-être un peu moins fort, la moyenne est impressionnante!
On aura donc droit aux excellentes imitations des vétérans de la revue, Benoit Paquette, Suzanne Champagne, Marc St-Martin et Martin Héroux auxquels s’ajoute cette année la Mary Poppins de Juste Pour Rire, Joëlle Lanctôt, qui endosse les personnages avec autant d’aisance que les vieux de la vieille avec lesquels elle partage la scène. Costumes, perruques, maquillages, accessoires se succèdent à un rythme endiablé, entrecoupés de courts sketchs tournés à l’avance qui permettent qu’il n’y ait aucun – mais là, aucun – temps mort. 90 minutes qui passent plus vite que l’éclair. Un tour de force. Denise Filiatrault, à qui on fait toujours un clin d’œil au «à quelle heure le pot ? Euh… le punch», n’aurait rien à redire!
On aura droit aux personnages incontournables comme Donald Trump (Martin Héroux) et Kim Jong-un (Suzanne Champagne) dans un love fest hilarant, Céline (Joëlle Lanctôt) avec maman Dion (Suzanne Champagne) qui n’est pas certaine que Pepe (Marc St-Martin) soit le bon choix pour «remplacer» René, Louis-José Houde (Benoit Paquette) qui tente de faire une joke mais est constamment interrompu par Mariana Mazza (Joëlle Lanctôt) qui se veut la police de l’intégration, de l’équité, du politically correct. Tous les sujets de l’année y passent: cannabis, #metoo, année électorale, débandade du PQ (avec un numéro touchant qui rend hommage aux disparus, Lise Payette, Bernard Landry mais aussi Jacques Parizeau et René Lévesque – wow!), libre-échange (producteurs de lait fâchés avec la chanson de Carmen Campagne que nous avons aussi perdue cette année) et plusieurs autres trouvailles délicieuses (le Petit Prince avec le coyote du Parc Ahuntsic? Fallait y penser!) …
Puis, on aura des numéros ingénieux avec d’autres incontournables de l’année comme Valérie Plante et Luc Ferrandez, Klô Pelgag et Mario Pelchat, François Legault et «la plus grande fan de la CAQ», Sonia Benezra qui invite Eric Lapointe et Alex Nevsky à sa nouvelle émission, Manon Massé, Jean-François Lisée et Philippe Couillard dans une parodie de Y a du monde à messe avec Christian Bégin, Michelle Blanc et Hubert Lenoir, Guy Mongrain qui nous parle de sa retraite… Du pur délice! Sans parler du numéro d’ouverture où l’on reprend une série de chansons bien connues du répertoire québécois avec des paroles qui résonnent avec les mots d’aujourd’hui et permettent de résumer habilement où nous en sommes comme société… pour le meilleur, mais surtout le pire!
Déjà, le soir de la première, tout roulait comme une machine bien huilée. Un sans-faute sans faille. Ceux qui pourraient croire que Revue et corrigée est un sous Bye-bye! devraient ravaler leurs mots. Année après année, on a droit à des interprètes de grand talent (autant au niveau du jeu, que de l’imitation ou de la voix chantée) se déployant allègrement dans des textes intelligents, des décors et des costumes de qualité.
Yvette Brind’Amour, cofondatrice du Rideau Vert et instigatrice de ses revues de fin d’année dans les années 50, se régalerait tout autant que nous. 2018 revue et corrigée Textes: Cassandre Charbonneau-Jobin, Luc Michaud, Justine Philie et Dominic Quarré
Script-édition: Daniel Leblanc Mise en scène: Natalie Lecompte Avec Suzanne Champagne, Martin Héroux, Joëlle Lanctôt, Benoit Paquette et Marc Saint-Martin. Une production du Théâtre du Rideau Vert Jusqu’au 5 janvier 2019 (1h30 sans entracte) *** Supplémentaires: Samedi 5 janvier 20h et dimanche 6 janvier 2019 15h Théâtre du Rideau Vert, 4664, rue Saint-Denis, Montréal Réservations : 514-844-1793 Pour en savoir plus : https://www.rideauvert.qc.ca/piece/2018-revue-et-corrigee/
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