par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)
Ces jours-ci, à La Chapelle, Scènes Contemporaines, rue Saint-Dominique, on présente la toute nouvelle création de Félix-Antoine Boutin et Odile Gamache, Petit Guide pour disparaître doucement qui, selon le dossier de presse, «est le second tome [sic] d’une réflexion sur la porosité de l’existence entamée à l’hiver 2016 avec la création du spectacle Un animal (mort)».
Le comédien et auteur Félix-Antoine Boutin se targue de vouloir faire éclater les formes, d’offrir un théâtre anti théâtral, de proposer des œuvres qui sortent des sentiers battus. Malheureusement, son «beau» texte finit par être une jolie collection de phrases – pour la majorité, hermétiques et incohérentes – qui ne nous mènera nulle part.
Dommage parce que, peut-être qu’en ayant fait appel à un œil (ou à quelques yeux) extérieur(s) (bien que l’on site un assistant à la création et une conseillère dramaturgique au programme – où étaient-ils ? là est ma question), l’auteur aurait pu transcender l’étrange grattage de bobos décousu et dépourvu de fil conducteur, et proposer plutôt une véritable œuvre théâtrale sur le mal de vivre, sur «l’éclatement de la notion de l’«être» tel qu’elle est développée dans la pensée actuelle de la revendication de l’individu comme symbole d’émancipation». Mais encore… qu’est-ce que ça veut dire, tout ça et comment est-ce que ça peut devenir autre chose qu’une phrase qui semble tirée d’un argumentaire de thèse de doctorat… ou de la liste d’objectifs d’un programme d’enseignement du Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement Supérieur du Québec? Pompeux. C’est tout.
Malgré le fait que le spectacle ne propose aucun personnage auquel s’attacher (pour ne pas dire s’accrocher) et aucune véritable histoire (qu’est-il arrivé au grand-père du personnage ? Qu’en est-il du seul amour qu’il ait eu pour un homme beaucoup plus vieux que lui ? Qu’en est-il de ce Toi dont il parle mais qui, finalement, n’est même pas Jérémie Desbiens, cité sous «Manipulations» dans le programme et portant les mêmes vêtements que ‘Moi’, parce qu’il ne fait que tirer des câbles et déplacer des objets sans jamais croiser le regard de ‘Moi’…), je me suis néanmoins laissé entraîner… et j’ai quand même accepté la proposition parce que je suis bon public. C’est un beau spectacle de poésie qu’on nous offre ici, sans plus… pour le moment.
Mais peut-être aussi que la scénographie d’Odile Gamache m’a beaucoup aidé à ne pas repousser complètement cette proposition. Parce qu’elle est ingénieuse, jolie, intéressante, inventive et, curieusement, elle propose un univers, un environnement qui n’est pas dépourvu d’intérêt. Cependant, contrairement à l’autre spectacle pour lequel Gamache signe le décor ces jours-ci (La Femme la plus dangereuse du Québec présenté à la salle Fred-Barry), ici, la forme noie le fond qui s’avère bien mince.
L’auteur veut ouvrir un débat sur «le ‘je’ [qui] pourrait se sublimer, pour ensuite se fondre dans un ‘nous’» ? Il faudrait qu’il nous en donne un peu plus pour entamer la discussion que de nous dire qu’il lit Lettre à un jeune poète de Rilke.
Petit Guide pour disparaître doucement Conception : Félix-Antoine Boutin et Odile Gamache Texte, mise en scène et interprétation : Félix-Antoine Boutin Scénographie : Odile Gamache Assistance à la création : Silvio Palomo Voix : Marie-Line Archambault, Béatrice Brault, Violette Chauveau, Juliane Desrosiers-Lavoie, Kathleen Fortin, Sébastien René, Peter James et Maxime Carbonneau Conseillère aux mouvements : Danielle Lecourtois Manipulations : Jérémie Desbiens Conception d’éclairage : Julie Basse Musique : Christophe Lamarche L. Direction de production : Émilie Martel Direction technique : Charles-Antoine Bertrand Conseil dramaturgique : Marilou Craft Une production de Création Dans la Chambre Du 17 au 21 octobre 2017 (55 minutes sans entracte) Photos : Khoa Lê. La Chapelle, Scènes Contemporaines, 3700, rue Saint-Dominique, Montréal Réservations : 514-843-7738
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