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«Les Enivrés» d’Ivan Viripaev: Un événement incontournable

NDLR: Présentée en novembre-décembre 2017, cette production est reprise au même Théâtre Prospero du 16 au 28 septembre 2019 avec deux changements à la distribution. La critique a été d'abord publiée sur la page Facebook de ZoneCulture le 25 novembre 2017 et nous la republions maintenant pour ceux et celles qui aimeraient en savoir davantage sur cette production en reprise. Merci.


par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)


La directrice artistique et générale du Groupe de la Veillée, Carmen Jolin, réalise un rêve en menant à terme un projet qui lui tenait à cœur et qu’il aura fallu arracher au destin: ramener la plume d’Ivan Viripaev au Prospero. C’est ainsi qu’après Oxygène et Illusions, présentées en 2013 et 2015 respectivement, Les Enivrés, une comédie sombre et lumineuse à la fois, investit la scène de la Salle principale avec une distribution hallucinante dirigée de main de maître par Florent Siaud, créant ainsi un événement théâtral incontournable.



Construite en tableaux, rappelant La Ronde de l’Autrichien Arthur Schnitzler, mais avec des personnages récurrents, Les Enivrés raconte plusieurs histoires différentes dont certaines se rejoindront, provoquées par des rencontres fortuites entre les personnages. Comme l’indique le titre (Drunk dans sa version anglaise), tous les personnages ont une chose en commun : ils sont en état d’ébriété. Certains sont même à quelques verres du coma éthylique ! Par moments, ils sont pathétiques, ridicules, honteux, nostalgiques, dépendants affectifs, mais au moment où l’on se surprend à vouloir les juger d’avoir trop bu, ils nous touchent, nous émeuvent, nous font rire (beaucoup !), nous font croire qu’ils méritent notre compassion et notre empathie.



Absolument sans faille, le texte de Viripaev et ses personnages, surtout, – bien qu’eux soient pleins de failles ! – posent des questions morales, éthiques, sociales, personnelles, universelles. La traduction signée Tania Moguilevskaia et Gilles Morel, qui n’en sont pas à leurs premières armes avec cet auteur, est tout aussi formidable. Pendant 95 minutes, le public est plongé dans des univers qui pourraient s’avérer glauques et tristes, mais qui sont étonnamment lumineux et divertissants. On ne voit pas le temps passer.


Pas de doute qu’une partie du mérite revient au metteur en scène Florent Siaud qui en est à sa quatrième expérience avec Viripaev (si on inclut une lecture publique de cette pièce). Plongeant ses acteurs dans une scénographie inspirante et inspirée de Romain Fabre qui multiplie les projets et ne déçoit pas encore ici, Siaud s’est entouré d’une distribution colossale, incluant Paul Ahmarani, David Boutin et Marie-Eve Pelletier qui l’avaient suivi dans l’aventure Illusions il y a deux ans, et qu’il dirige magnifiquement. Difficile d’imaginer que cette bande de joyeux lurons n’a pas eu un plaisir fou à développer ce projet.




Parlant de la distribution, pas un seul maillon faible dans cette équipe de dix comédiens, plusieurs s’attaquant à des contre-emplois absolument délicieux, notamment Dominique Quesnel en soulon bourru et bourré déguisé en ours pour un enterrement de vie de garçon, Évelyne Rompré en prostituée complètement paf mais fan de cinéma d’auteur iranien (!) et Benoit Drouin-Germain en jeune homme mariné, un peu trop admiratif de son frère prêtre catholique ! De savoureux personnages rendus par des interprètes exceptionnels.


En plus de ces trois performances formidables, je ne pourrais passer sous silence mes coups de cœur absolus pour Maxime Denommée en jeune ‘futur’ marié revêtant un tutu et un collant rose qui lui moule le corps (Il est tellement touchant et adorable !) et Marie-France Lambert qui m’a encore une fois soufflé, cette fois – tout particulièrement – avec son jeu physique stupéfiant. Une redécouverte et une véritable merveille !Ajoutez à tous ces éléments impeccables la conception sonore fascinante de Julien Éclancher, les éclairages de Nicolas Descôteaux et la vidéo de David Ricard, et vous obtenez un des spectacles incontournables de la saison théâtrale 2017-2018. Un can’t miss – comme disent les Chinois – mais dans tous les sens du terme.


Les Enivrés d’Ivan Viripaev Traduction : Tania Moguilevskaia et Gilles Morel Mise en scène : Florent Siaud Avec Paul Ahmarani, David Boutin, Maxime Denommée, Benoit Drouin-Germain, Maxim Gaudette, Marie-Pier Labrecque, Marie-France Lambert, Marie-Eve Pelletier, Dominique Quesnel et Évelyne Rompré Une production du Groupe de la Veillée Jusqu’au 16 décembre 2017 (1h35 sans entracte) Théâtre Prospero – salle principale, 1371, rue Ontario Est, Montréal Renseignements : 514-526-6582 – theatreprospero.com Photos : Nicolas Descôteaux En reprise du 16 au 28 septembre 2019 avec Dany Boudreault et Renaud Lacelle-Bourdon en remplacement de Benoit Drouin-Germain et Maxim Gaudette

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