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«Le Projet Laramie» de Moisés Kaufman: Parce que 20 ans plus tard…

Dernière mise à jour : 6 juin 2019


par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)


Comme projet de lancement de son nouvel ENSEMBLE – Collectif théâtral LGBTQIA+, le fondateur et directeur artistique Jean-François Quesnel ne pouvait pas choisir pièce plus pertinente que Le Projet Laramie de Moisés Kaufman, cette ambitieuse fresque documentaire créée en 2000, adaptée au cinéma en 2002 et qui fait le tour du monde depuis. La suggestion de la metteure en scène Laura Fortin de remonter la pièce pour marquer le 20e anniversaire du sauvage assassinat du jeune homosexuel du Wyoming, Matthew Shepard, ne pouvait tomber plus à point. Parce que 20 ans plus tard, on en a parcouru, du chemin, mais…




Quelques semaines après que cette terrible attaque homophobe ait secoué la petite ville de Laramie, au Wyoming, et que la nouvelle ait fait le tour du monde, le dramaturge newyorkais Moisés Kaufman et une troupe de comédiens débarquaient pour prendre le pouls de la ville, interviewer quelque 200 citoyens de Laramie, des amis, des témoins, des collègues, confrères, consoeurs, professeurs qui avaient côtoyé la victime de près ou de loin. Le résultat est une pièce de plus de deux heures où l’on rencontre quelque soixante personnages joués par une distribution de onze comédiens, amateurs, semi-professionnels et professionnels.



Sans s’ennuyer une seule minute grâce à l’excellent texte de Kaufman et à la direction impeccable de Laura Fortin, soutenue par Luc Arsenault et Michèle Macaigne, on assistera, comme à un documentaire, au périple de la troupe de théâtre au cœur de Laramie, aux nombreuses entrevues qui nous présentent les citoyens sympathiques de cette petite ville sans histoire (jusque-là) et au procès des deux accusés, ces jeunes homophobes d’âge universitaire qui ont battu, attaché et laissé pour mort ce Matthew Shepard devenu bien malgré lui le martyr porte-étendard de la cause LGBT.

Cette grande fresque évoluera dans un décor ingénieux pensé par Laura Fortin, Réjean Lacoste et Pascal Derome, les deux derniers jouant aussi dans le spectacle. Les comédiens changeront rapidement quelques éléments de décor, quelques accessoires pour nous emmener dans tous les lieux visités. Ils se transformeront aussi sous nos yeux, tous les costumes étant suspendus à proximité pour éviter les longueurs. Efficace et toujours rafraîchissant.

La traduction/adaptation du comédien Emmanuel Schwartz (qu’on applaudissait cet automne dans le Candide ou l’Optimisme de Pierre-Yves Lemieux au TNM) est impeccable. Bien que certaines répliques un peu trop québécoises auraient gagné à être adaptées avant d’être mises dans la bouche de comédiens d’origine française, c’est un bien petit bémol dans une critique qui – vous l’aurez deviné – n’a pas grand-chose de négatif à dire. Il me semble seulement qu’on aurait pu ajuster légèrement certaines phrases, certains mots qui auraient rendu quelques-uns de leurs personnages moins… détonants.

Qu’à cela ne tienne, parmi cette excellente distribution, très peu de maillons faibles. Et parce que je crois qu’il vaille toujours mieux accentuer le positif, je soulignerai les performances impressionnantes – et souvent bouleversantes – de Ginette Heppelle et Edith Cayouette (mes plus grands coups de cœur), Hugo Bourret (19 ans !) et Jean-François Bolduc, Naomie Allard Hamelin et la jeune Elizabeth Roy (17 ans !). J’ai aussi été épaté par la narration de Réjean Lacoste dans la première partie (les comédiens se la partagent, une excellente idée), par le monologue de Félix Tardif dans le rôle du père de Matthew et par les nombreuses compositions de Pascal Delorme et Charleyne Bachraty malgré ce que je disais sur l’accent français. Enfin, j’ai adhéré aux propositions de François Proulx en Kaufman et en prof d’université gai.



Souhaitons que Le Projet Laramie puisse être repris dans un avenir rapproché étant donné que les quatre représentations à la salle Paul-Buissonneau ont été présentées – contre toute attente – à guichet fermé. ENSEMBLE prépare déjà son prochain projet, l’adaptation théâtrale du film Clue, lui-même adapté du jeu de société… un projet que je me permettrai de trouver étrange comme choix pour un tel groupe. Pourquoi ne pas plutôt tenter de poursuivre dans le mandat de donner non seulement une voix à des artistes LGBTQIA+, mais encore à des personnages qui ne sont pas assez entendus ?


Le Projet Laramie de Moisés Kaufman Traduction : Emmanuel Schwartz Mise en scène: Laura Fortin Mentors à la mise en scène: Michèle Macaigne et Luc Arsenault Avec Naomie Allard Hamelin, Charleyne Bachraty, Jean-François Bolduc, Hugo Bourret, Edith Cayouette, Pascal Derome, Ginette Heppelle, Réjean Lacoste, François Proulx, Elizabeth Roy et Félix Tardif Une production de Ensemble, Collectif théâtral LGBTQIA+ 13 au 16 décembre 2018 à 20h – représentation du 16 décembre 14h (2h30 incluant un entracte) Salle Paul-Buissonneau, Centre Calixa-Lavallée, 3819, avenue Calixa-Lavallée (Parc Lafontaine), Montréal Billetterie: lepointdevente.com

Photos : Roxane Larouche

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