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«Baby-Sitter» de Catherine Léger: Chère Chantal,…

Dernière mise à jour : 13 juil. 2019

par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)


Écrite dans le cadre d’une résidence d’écriture et créée au Théâtre La Licorne au printemps 2017, Baby-Sitter de Catherine Léger (auteure de Filles en liberté, aussi créée à La Licorne l’année suivante) a connu un tel engouement que son auteure et une de ses comédiennes, Isabelle Brouillette, ont décidé de s’associer pour la produire en tournée. Depuis, la pièce a fait le tour de la province avec quelques dates en Ontario et au Nouveau-Brunswick. La joyeuse aventure se termine ce soir au tout nouvel Espace Le Vrai Monde? du Collège Ahuntsic qui lançait sa toute première programmation officielle hier soir lors d’un sympathique 5 à 7.


Catherine Léger raconte qu’elle a écrit Baby-Sitter dans «une urgence coupable» quand, en flânant sur Facebook, elle est tombée sur un papier qui parlait de blagues de viol et de statistiques sur la violence faite aux femmes. Il n’en fallait pas plus pour que l’étincelle de la création lui permette de créer l’anecdote qui allait être la bougie d’allumage de sa nouvelle pièce. Cédric, employé d’Hydro-Québec, est suspendu lorsque, lors d’un reportage en direct de la journaliste sportive Chantal Machabée, il photobombe la caméra avec un éloquent «Fourre-la dans l’cul» (qui n’est pas sans rappeler le «Grab her by the pussy» d’un certain milliardaire américain depuis devenu président!). Sa «joke», qu’il tente d’abord de justifier par une consommation d’alcool pas excessive mais qui l’aurait rendu «gorlo» (je paraphrase!), reçoit des centaines de milliers de vues sur les réseaux sociaux, crée une polémique et galvanise un débat à savoir «juste drôle, pas drôle du tout, grave, pas grave, misogyne ou pas».



Participant au débat, Nadine (Isabelle Brouillette), la conjointe borderline post partum de Cédric, Jean-Michel (Steve Laplante), son frère journaliste intellectuel aux airs supérieurs, et Emy (Victoria Diamond), la nouvelle gardienne d’enfants qu’embauche Cédric pour s’occuper de bébé Léa sans trop s’attarder au CV de celle qui a clairement des airs de Scarlett Johansson… et un passé mystérieux. Dans cette «comédie grinçante» (qualificatif choisi par le metteur en scène Philippe Lambert et on ne saurait le contrarier) et intelligente, Catherine Léger montre encore une fois la créativité et la finesse de son écriture ainsi que sa capacité à équilibrer les points de vue malgré un sujet qui pourrait tellement favoriser un côté plutôt que l’autre. Tout au long de la pièce, l’auteure surprend sans condescendre, amuse sans tomber dans le cabotinage, suscite la réflexion sans assommer.



Philippe Lambert dirige habilement une distribution cinq étoiles. David Boutin, dans le rôle du «sans-génie tout dans les muscles, rien dans la tête», se transforme de façon impressionnante. Sa voix, sa diction, sa gestuelle, même son regard contribuent à créer un personnage qui le métamorphose. On est loin du sympathique docteur dans La Grande Séduction, du créatif publicitaire dans Nouvelle adresse ou de son autre excellente composition dans Les Enivrés au Prospero la saison dernière. Il est époustouflant ! Isabelle Brouillette prend clairement son pied dans le rôle de Nadine, cette jeune mère professionnelle qui peine à retrouver sa vie après avoir donné la vie. Steve Laplante, toujours excellent, est au sommet de sa forme (je l’avais aussi beaucoup aimé dans Trahison de Pinter au Rideau Vert l’an dernier) et la sublime Victoria Diamond, que j’avais découverte dans Warda de Sébastien Harrisson au Prospero en janvier, est charmante, nuancée, tellement juste dans le rôle-titre troublant.



À l’instar de Filles en Liberté, Baby-Sitter est une comédie qui laisse des traces. Une pièce aux allures légères mais qui fait son chemin. Non seulement sur les routes du Québec, mais dans les esprits des spectateurs qu’elle rejoint.


Baby-Sitter Texte: Catherine Léger Mise en scène: Philippe Lambert Avec David Boutin, Isabelle Brouillette, Victoria Diamond et Steve Laplante avec l’aimable participation de Chantal Machabée Scénographie, costumes et accessoires: Elen Ewing Éclairage: Étienne Boucher Conception sonore: Benoît Côté Direction technique: Marylin Gagnon Régie: Ludovic Paré et Maude Serrurier Une production Théâtre Catfight en codiffusion avec La Manufacture En tournée à travers le Québec Dernières représentations 27 et 28 novembre 2018 à 19h Espace Le Vrai Monde ? – Collège Ahuntsic 9155, rue Saint-Hubert, Montréal

Billetterie: 514-389-5921 Pour en savoir plus : https://ahuntsic.tuxedobillet.com/

Photos : Véro Boncompagni


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