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«Antioche» de Sarah Berthiaume: Voyage dans le temps

Dernière mise à jour : 9 mars 2021

par Yanik Comeau (ZoneCulture)


Le Théâtre Bluff propose, ces jours-ci, le tout nouveau texte de la comédienne et auteure Sarah Berthiaume qui nous avait donné le fascinant Yukonstyle dans la salle principale du Théâtre d’Aujourd’hui il y a quelques années. Le metteur en scène Martin Faucher remet ça avec Antioche à la Salle Fred-Barry de la Nouvelle Compagnie Théâtrale.


Présenté jusqu’au 25 novembre, Antioche est un Back to the Future absolument génial dans lequel Antigone, nièce de Créon, fille d’Œdipe, sœur d’Ismène, de Polynice et d’Étéocle, héroïne de Sophocle et d’Anouilh, est parachutée dans une école secondaire multiethnique – que l’on devine sans doute montréalaise – et souhaite faire jouer sa tragédie par la troupe de théâtre des finissants. Dans l’espoir de nous convaincre, elle nous lira même des passages de l’adaptation d’Anouilh – une des meilleures, des plus contemporaines, des plus accessibles, nous le rappellera-t-elle habilement – mais le choix du groupe s’arrêtera sur Grease ! «Ugh! Tu m’imagines avec une veste des Pink Ladies?» Tordant !



Antigone se lie d’amitié avec Jade, une fille d’immigrants tunisiens, qui entretient une relation nébuleuse avec un jeune homme sur Internet. Comme sa mère avant elle, Jade se trouvera plongée dans une aventure troublante et on ne peut plus actuelle qui la mènera aux abords de l’Oronte, dans l’ancienne Antioche gréco-romaine maintenant en sol turc.


Antioche propose une histoire ingénieuse, brillante, vivante et moderne qui permet aux adolescents comme aux adultes de revisiter la famille incestueuse de Thèbes qui a traversé les époques, des Grecs à aujourd’hui, tout en se retrouvant dans des situations 100% contemporaines dans lesquelles tout le monde se reconnaît avec Skype, les cells, les textos, les émoticons, les conseils cuisine de Ricardo (oui, oui, vous avez bien lu !) et les kamikazes qui croient en leurs causes.


La mise en scène et la direction d’acteurs de Martin Faucher sont encore une fois impeccables. Cinq ans président du Conseil québécois du Théâtre et maintenant directeur artistique du Festival TransAmeriques, Faucher est passé maître dans l’art de signer des mises en scène ingénieuses mais sans prétention. Il se met au service du texte et des acteurs sans pour autant tomber dans la complaisance. Il fait école.


Sur scène, Sarah Laurendeau est une Antigone parfaite, aux antipodes de la fille angoissée et grugée par l’insécurité qu’elle jouait plus tôt cette saison dans la reprise de Table rase de Catherine Chabot à Espace Libre. Pétillante, frondeuse, fonceuse, passionnée et déterminée, elle donne tout et la salle pleine d’adolescents lors de la représentation scolaire à laquelle j’ai assisté la suit sans condition, comme un modèle, une amie, une chum un peu fuckée mais vraiment hot qu’ils suivraient au bout du monde.



Comme Jade qui partira au bout du monde, influencée par la détermination et l’énergie de son amie des Temps Anciens. Dans ce rôle, la jeune Mounia Zahzam est impeccable. Touchante et forte, brillante, conscientisée et naïve à la fois. Complétant la distribution, une Sharon Ibgui solide dans le rôle d’Inès, la mère de Jade, qui n’a pas trouvé le bonheur dont elle rêvait dans sa terre d’adoption. Ensemble, Zahzam et Ibgui font un tandem crédible et explosif, particulièrement dans les dernières minutes du spectacle. Sublime.


Après l’Antigone au printemps de Nathalie Boisvert au printemps dernier, justement, l’Antigone de notre automne, celle de Sarah Berthiaume, nous donne le courage d’affronter le froid et tous les autres obstacles qui pourraient nous attendre… tout en nous rappelant le flair et la vision du directeur artistique du Théâtre Denise-Pelletier, Claude Poissant, qui frappe un doublé chez les Grecs avec l’Illiade de Marc Beaupré qui remporte un beau succès en même temps.


Antioche Texte : Sarah Berthiaume Mise en scène : Martin Faucher Avec Sharon Igbui, Sarah Laurendeau et Mounia Zahzam Une production du Théâtre Bluff 7 au 25 novembre 2017 – supplémentaire le 21 novembre à 19h30 (1h20 sans entracte) Salle Fred-Barry (Théâtre Denise-Pelletier), 4353, rue Sainte-Catherine, Montréal Réservations : 514-253-8974 Photos : Marie-Andrée Lemire

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