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«Des souris & des hommes» de Steinbeck: Un duo de rêve dans une production qui nous hisse au 7e Ciel

Dernière mise à jour : 8 juil. 2019

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)



Quand on parle d’œuvres incontournables, Des souris et des hommes – le roman, la pièce de théâtre, les adaptations cinématographiques – figurent toujours parmi les classiques de l’ère moderne. John Steinbeck, comme Harper Lee, J.D. Salinger et William Faulkner, pour ne nommer que ceux-là, sont étudiés à l’école et l’amour que leur vouent leurs lecteurs ne se dément pas au fil des années. Leur public se renouvelle et leurs fans les relisent encore en vieillissant.


Et bien que l’œuvre de Lee soit très connue (To Kill A Mockingbird est un des romans les plus vendus et les plus étudiés chez nos voisins du sud), celle de John Steinbeck est impressionnante non seulement par sa longévité mais par son volume. Of Mice and Men est une des œuvres les plus lues, les plus jouées, les plus adaptées du répertoire américain, mais Steinbeck n’a pas écrit qu’un seul chef d’œuvre. Il les a multipliés : East of Eden, The Grapes of Wrath et le non moins touchant The Red Pony, entre autres.

Que l’histoire des ouvriers George et Lennie touche encore les cœurs plus de quatre-vingts ans après la publication du roman qui leur est consacré n’a rien d’étonnant. La structure du roman – et la pièce de théâtre, dans toutes les adaptations que l’on ait vues au fil des décennies – est limpide, simple, linéaire sans jamais prendre le lecteur ou le spectateur pour un illettré ou les personnages pour des «petites gens» qui ne mériteraient pas notre attention.



La grande force de la nouvelle production de la Compagnie Jean Duceppe, de la nouvelle traduction de Jean-Philippe Lehoux (qui renouvelle quelque peu le dialogue sans nous éloigner trop des mots que nous connaissons par cœur donc en évitant un dépaysement qui aurait pu être déstabilisant) et de la sublime mise en scène de Vincent-Guillaume Otis est de respecter le parti pris de Steinbeck pour les cowboys aux chapeaux blancs et ceux aux chapeaux noirs tout en nuançant de nombreuses teintes de gris les personnages les plus caricaturaux de l’œuvre. Bien que Curley (magnifiquement interprété par Maxim Gaudette) soit toujours le même fils du boss jaloux un peu dégueulasse avec son gant de cuir plein de Vaseline sur une seule main et que sa nouvelle épouse Mae ait toujours des fourmis dans les jambes et ait bien de la difficulté à rester enfermée dans la maison, on ne peut que s’incliner devant les choix du traducteur, du metteur en scène et des interprètes. Tout particulièrement en ce qui a trait à Marie-Pier Labrecque, la seule fille de la distribution, qui prête à La Femme de Curley une plus belle humanité, une plus triste vulnérabilité, une plus troublante urgence, une plus grande dignité que dans les productions précédentes que j’aie eu la chance de voir. Elle est déchirante et sublime !


J’ai aussi été soufflé par l’interprétation de Luc Proulx, un de nos plus grands acteurs, un comédien tellement sous-estimé, qui ne déçoit jamais, et qui dans sa première présence chez Duceppe (vraiment? En quoi, quarante ans de carrière? Incroyable, non?), prête vie au merveilleux personnage du vieux Candy, joué chez nous par un Jean Duceppe déchirant dans le célèbre téléthéâtre de Paul Blouin en 1971 et par Benoit Girard il y a 31 ans sur cette même scène. Là où Duceppe, Girard et leurs metteurs en scène respectifs Blouin et François Barbeau avaient opté pour la fragilité et l’infinie tendresse (certes de bons choix), Proulx et Otis font le pari d’un Candy encore bien vivant, beaucoup plus fort et apte au travail que son pauvre chien en fin de vie, malgré sa main mutilée par une machine. Un grand acteur, une grande interprétation!


Bien que toute la distribution soit certes à la hauteur, que la mise en scène de Vincent-Guillaume Otis (pourtant plus connu pour son travail d’interprète que pour la direction d’acteurs, quelque chose qui est définitivement appelé à changer après ce tour de force) relève de la virtuosité la plus impressionnante et que le travail de tous les concepteurs soit à souligner (particulièrement Romain Fabre au décor, Julie Basse aux éclairages et Jean Gaudreau à la musique), il est clair que toute production de Des souris et des hommes repose sur ceux qui joueront George et Lennie. Benoit McGinnis qui multiplie les rôles colossaux ces dernières années (Son Homme Éléphant au Rideau Vert la saison dernière qui repartira en tournée de janvier à mars 2019, entre autres) et Guillaume Cyr qui a triomphé la saison dernière dans La Meute de Catherine-Anne Toupin, un autre succès majeur qui multipliera les reprises dans les prochains mois, forment un tandem de rêve. McGinnis apporte à George toutes les nuances de frustration et d’empathie que demande le personnage et Guillaume Cyr réussit à se créer un Lennie bien à lui, évitant par on ne sait quel miracle les tendances que nous aurions tous à le comparer à ses prédécesseurs. Une performance sans faille, une interprétation magistrale que l’on n’oubliera jamais.


Bref, Des souris et des hommes, la deuxième production de la première saison du tandem Traversy-Laurin à la direction artistique de Duceppe, la dernière à avoir été un peu touchée par Michel Dumont qui avait d’abord été approché avec le projet par Otis avant d’annoncer qu’il céderait sa place à la tête de la compagnie, mérite tous les éloges et tous les compliments qui fusent de partout. Des supplémentaires? Mais bien sûr! Encore et encore.Après Duceppe, Girard et Walston, Luc Proulx. Après Luce Guilbault, Johanne Fontaine et Sherilyn Fenn, Marie-Pier Labrecque. Après Loiselle, Loiselle et Sinise, Benoit McGinnis. Après Godin, Dumont et Malkovitch, Guillaume Cyr. Des souris et des hommes, une œuvre dont on ne se lasse jamais. Des souris et des hommes de John Steinbeck Traduction: Jean-Philippe Lehoux Mise en scène: Vincent-Guillaume Otis Assistance à la mise en scène et direction de plateau : Stéphanie Capistran-Lalonde

Avec Guillaume Cyr, Benoit McGinnis, Nicolas Centeno, Maxim Gaudette, Mathieu Gosselin, Marie-Pier Labrecque, Martin-David Peters, Luc Proulx et Gabriel Sabourin.

Décor : Romain Fabre Costumes : Marc Sénécal Éclairages : Julie Basse Musique : Jean Gaudreau Accessoires : Normand Blais Vidéo : Yves Labelle Production de la Compagnie Jean Duceppe. 24 octobre au 1er décembre 2018 (durée : 1h30 sans entracte) *** Supplémentaires: Samedi, le 24 novembre 20h30, dimanche, le 25 novembre 14h30, jeudi, le 29 novembre 20h Théâtre Jean-Duceppe, Place des arts, Montréal. Billets: 514-842-2112 Photos : Caroline Laberge Pour en savoir plus : https://duceppe.com/a-l-affiche/des-souris-et-des-hommes/

En tournée à travers le Québec pendant la saison 2019-2020 6 décembre 2019: Beloeil 13 décembre 2019: Lasalle 17 décembre 2019: Sainte-Geneviève 5 janvier 2020: Sainte-Thérèse 10 janvier 2020: Sainte-Marie de Beauce 12 janvier 2020: Québec 14 janvier 2020: Baie-Comeau 17 janvier 2020: Saint-Jean-sur-Richelieu 18-19 janvier 2020: Longueuil 21 janvier 2020: Rimouski

24 janvier 2020: Terrebonne

28 janvier 2020: Trois-Rivières 31 janvier 2020: Gatineau 1er février 2020: Gatineau 5 février 2020: Lac-Mégantic 7 février 2020: Laval 11 février 2020: Chicoutimi 12 février 2020: Dolbeau 15 février 2020: Salaberry-de-Valleyfield 19 février 2020: Victoriaville 21 février 2020: Saint-Hyacinthe 22 février 2020: Joliette 23 février 2020: Saint-Jérôme

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